Le chant grégorien n'est pas un chant de plein air. Il n'est pas non plus un chant de salle de spectacle, ni de studio d'enregistrement. Inspiré pour la prière et l'action de grâces il se chante à titre gracieux pour les beaux yeux de Dieu. Enfin la langue liturgique étant le grec puis surtout le latin, il a dû se laisser mouler par la diction accentuée du latin.
Le chant grégorien n'est pas un chant de plein air. Il existe bien sûr des exceptions : les chants de procession, les pièces pour des circonstances extraordinaires comme les acclamations carolingiennes ou encore un certain grégorien populaire comme on peut encore le trouver à l'occasion du triduum pascal pour les confréries de pénitents. En France la tradition se perpétue par exemple à Perpignan. Signalons encore « le livre Vermeil » de l'abbaye Montserrat en catalogne
Chant d'oratoire, c'est dans ces édifices publics, dépouillés de tout ce qui n'est pas ordonné au culte, que se produira la genèse du grégorien. Cela n'a pas été sans lui conférer certaines caractéristiques. Une église même petite jouit d'une acoustique ample du fait qu'elle est peu meublée. Une façon de chanter en a implicitement résulté. « La résonance d'une église contribue, pour des raisons culturelles communes à l'orient et l'occident, à lui donner son caractère d'édifice sacré, il ne faut pas l'oublier » ( de ecclesia. com). Pour préserver une certaine clarté et éviter la confusion sonore il faut savoir se jouer de la réverbération et en jouer. L'église est le premier et le plus indispensable instrument d'accompagnement du chant grégorien. Dans une communauté pourtant bien rangée, bien peignée, il se trouve toujours des éléments hirsutes, pour produire des bizarreries vocales. L'acoustique généreuse de l'oratoire jette un voile pudique sur ces écarts et il n'y paraît presque plus rien si on ne côtoie plus de trop près, ces éléments hétérogènes. Inconsciemment le chur s'adapte et joue de l'église comme il jouerait de la flûte. Il n'est pas impossible que le retour des notes par écho ait favorisé la création de ces mélodies monodiques de type modale en mettant en valeur certaines cordes sur lesquelles on revient, on insiste, pour faire chorus avec l'oratoire. De fait toute église a une affinité pour telle note émise ou une de ses harmoniques, elle entre en résonance avec elle. Si ce n'est un des élément de sa genèse, du moins cela aura permis un mariage heureux avec le chant modal. Chant d'oratoire, le grégorien trouve donc son accompagnement propre « a cappella » par la chapelle pourrait-on dire. Cette expression se traduit en fait par « sans accompagnement » ce qui serait plutôt la traduction de « a nihilo »ou « sine organo » . A ce sujet, l'accompagnement d'un orgue n'est sans doute pas requis, il peut s'avérer utile pour certains churs à condition qu'il reste un accompagnement et non un entraînement, un fil très discret qui prolonge les voix finissantes pour une sorte d'échange, en fondu enchaîné, entre la richesse du timbre vocal et la pureté du timbre instrumental.
Certains ont crû voir une correspondance entre les voûtes romanes et le chant grégorien, en particulier pour la rondeur des sommets nommés apex. On pourrait le dire du gothique pour l'élan des mélodies. Mais comparaison n'est pas raison.
Le chant grégorien n'est pas un chant de salle de spectacle, ni de studio d'enregistrement. Fait pour la prière chorale, il ne se donne pas volontiers en spectacle. Il se devait de garder une certaine intériorité et une sobriété adaptée à une prière quotidienne. De plus les choristes étant avant tout des religieux ou des fidèles, il fallait trouver une esthétique simple qui ne suppose pas de prouesses vocales mais qui mette en uvre d'autres qualités qui sont celles de la prière notamment. En ce sens ce serait plutôt un genre pop. Il n'y a donc pas à faire du « bel canto ». Ce serait d'ailleurs insupportable dans le contexte du quotidien.
Le plain-chant requiert une certaine abnégation pour se fondre dans l'ensemble, dans un chant homophone à l'unisson et éviter une expressivité individuelle discordante. Le bonheur de prier ensemble, de communier dans une seule expression rejaillit sur l'effet donné. Rien de plus désastreux qu'un combat de coqs pour imposer ses nuances. Les nuances en deviennent tellement appuyées qu'elles cessent d'être des nuances. Même dans certains ordres peu soucieux d'expression artistique, la prière peut transfigurer le chant, c'est le cas des chartreux par exemple et autrefois aussi des trappistes . « Cantare amantis est » écrivait Saint Augustin : « chanter est le fait de celui qui aime » et si on aime ça chante et enchante toujours d'une manière ou d'une autre. A l'inverse, une trop grande préoccupation d'art peut se révéler désastreuse. Des chantres ou une schola, trop soucieux de négocier leurs neumes produiraient l'impression désagréable qu'ils sont plus à leur l'art qu'à leur prière. L'art et la technique du chant doivent rester réservés aux classes de chant. A l'office c'est tout autre chose il faut laisser faire l'acquis . Plus ça paraîtra naturel plus ce sera transparent du surnaturel. Naturel ne veut pas dire arbitraire. Ce chant demande de l'application et ceci c'est déjà de la prière. Nous sommes dans un domaine ou du sublime au ridicule il n'y a qu'un pas. Mieux vaut éviter tout ce qui peut faire affecté.
Tout ce qui précède caractériserait plutôt le plain-chant qui « est un type de Musique vocale traditionnel, apparaissant généralement dans un contexte religieux. Ce style musical est ancien et répandu. Il n'est pas propre aux rites catholiques, mais on en trouve également des exemples dans les cantillations et les pièces de rites hébreux, musulmans ou boudhistes. Bien que les termes soient souvent pris l'un pour l'autre, il convient de distinguer le plain chant (un style musical) du chant grégorien (un répertoire liturgique composé dans ce style). »(wikipedia) Ceci rejoint une réflexion du pêre Kim en Joong , dominicain coréen, peintre sur vitrail, selon lui il y aurait des analogies dans le chant sacré de son pays et le chant grégorien.
Le chant grégorien se caractérise par une certaine sobriété d'expression. La charge sensible est très ténue par rapport à nos musiques contemporaines instrumentales ou le chant choral polyphonique. Il est comme la forme audible du silence, du silence intérieur. Dieu parle "le bruit dune brise légère" (1 Rois 19). Monodique, homophone, a cappella, tout cela peut paraître austère d'autant plus qu'il faut ajouter que les notes sont isochrones c'est-à-dire qu'elles ont toutes relativement la même durée ( question débattue à nuancer). Tout se fait avec rien ou si peu que cela confère une fluidité très sereine et comme intemporelle à ce chant. Certains iront jusqu'à dire que tout y est tellement à dose homéopathique que dès qu'on prend conscience d'une nuance c'est qu'on en fait trop, c'est trop matériel. C'est sans doute excessif, une nuance même assez sentie mais réussie se fait volontiers oublier, elle ne dépasse pas le seuil de la conscience. Seuls les effets ratés se ressentent de l'artifice comme d'une mouche sur du miel. Les nuances se font souvent en creux, par abstention d'un effet attendu, pour mettre en valeur la grande limpidité et simplicité d'une pièce. C'est sans doute une illusion que de vouloir se donner un style frustre pour faire médiéval en s'imaginant qu'en ces temps reculés l'homme, plus proche du singe, ne pouvait avoir qu'un chant peu dégrossi.
Inspiré pour la prière et l'action de grâces il se chante à titre gracieux pour les beaux yeux de Dieu. L'action de grâce est un échange de gratuité ou de gratusté. ( grâce, vient du latin grâtis i.e. gratuit mais aussi de gratus i.e .beau, le mot gracieux comporte ces deux acceptions ). C'est par gratitude et amour que le fidèle chante pour son Dieu. Motivés ni par l'argent ni pour se faire un nom, presque tous les compositeurs de grégorien restent anonymes, le moteur en est la charité, or l'amour est tout à fait impayable, ce qu'on peut avoir pour son argent ne sont que des grimaces d'amour. Chanter pour Dieu ne peut se faire que si on s'enchante de lui c'est un échange gracieux que doit refléter ce chant sacré.
La rythmique du chant grégorien se base sur le mot latin. En bas latin contemporain du grégorien, les brèves et les longues semblent ne plus jouer de rôle, par contre l'accent tonique est essentiel. Les mots latins sont accentués en spondé ; l'accent est alors placé sur la pénultième syllabe et engendre un rythme binaire, ou en dactyle sur antépénultième syllabe et c'est un rythme ternaire. Dans la théorie de Dom Mocquereau sur « le nombre musical » l'accent ne correspond pas forcément avec un ictus . Normalement l'accent d'un spondé est au lever et celui d'un dactyle au poser. L'accent ne se fait pas à l'italienne, selon les spécialistes. De plus il faut rester vigilant pour prévenir tout télescopage sur les dactyles et éviter ces précipitations qu'on appelle : triolets.
La mélodie aime sa liberté, elle peut avoir à prendre son indépendance par rapport au mot latin surtout dans des pièces très ornées comme peuvent l'être: introït, graduel, jubilus d'alléluia, offertoire, chant de communion, les répons prolixes, certaines antiennes. Les traits et la psalmodie antiphonée et chantée suivent le texte de plus près.
Le rythme en grégorien est essentiellement une relation d'élan à retombée : arsis à thésis comme on le dit pour le rythme élémentaire du mot ou de l'incise, ou encore de protase et d'apodose pour le grand rythme plus large de plusieurs incises ou pour une pièce entière. Concrètement l'essentiel est de faire sentir le fil conducteur. Les signes rythmiques peuvent donner des indications sur la façon de structurer la pièce. Evitons de les rendre matériellement. Un épisème horizontal ne correspond pas forcément à un allongement, il indique simplement une nuance à rendre. Actuellement la tendance est de supprimer ces signes rythmiques. En fait ils ne sont indispensables que si on suit la méthode dite de Solesmes avec comptage telle qu'elle est enseignée actuellement à la Schola Saint Grégoire au Mans. Ce comptage n'est pas un découpage du temps en mesure métronomique. Le rythme reste libre et le comptage sert uniquement à bien mettre en valeur le rythme tantôt binaire tantôt ternaire. La fondation Ward a pour cela mis toute une technique gestuelle au point pour bien inculquer cette rythmique à un niveau réflexe chez l'élève.
La langue latine a peut-être eu un effet secondaire sur le chant grégorien. C'est une langue, comme les langues latines à sa suite, où les voyelles ont un rôle important, contrairement aux langues sémitiques achalandées de tout un lux de consonnes assez déroutantes pour un occidental. Or il est bien connu que la valeur d'une note, sa hauteur, ne se cale que sur la voyelle d'une syllabe. L'émission de la consonne qui précède ne présente que des transitoires musicales, timbre complexe qui n'a pas encore de fréquence stabilisée. Le son ne prend son régime de croisière que sur la voyelle avec le timbre de cette voyelle et la fréquence vibratoire qui donne la hauteur au sein de la gamme. Une langue dont les voyelles ont un rôle sonore déterminant sera habillée par une mélodie qui mettra bien en valeur ces voyelles avec des notes bien définies et bien justes. Les vocalises se font sur les voyelles sans répercution de la consonne associée.
Très vite l'échelle diatonique (ie :pas de chromatisme avec sensibles) s'est imposée. Cette gamme partage l'octave en 7 tons plus une option sur le si bémol. Il faut s'abstenir du sport de la glissade d'une note à l'autre : les port de voix ou sirènes en grégorien, sont du plus mauvais effet. Tout est clair et distinct mais sans coupure de son. Les notes se relient par une « mora vocis » en sorte de donner l'impression d'un bandeau ou d'une écriture en plein et délié , sans « crottatim » sur les notes ce qui nuirait au grand legato. A cet effet, il est souhaitable que tous les choristes ne prennent pas leur respiration ensemble. De plus, en voix chantée (et non parlée) le son ne se conclut jamais de manière abrupt il s'évanouit progressivement.
La modalité est une caractéristique du chant grégorien. Elle est issue d'une longue tradition juive et grecque. Elle a été étudiée et systématisée pour nos methodes scientifiques modernes. Elle était probablement assez intuitive à l'époque. Du moins, on ne prenait pas le mode d'une pièce pour une barrière à ne pas transgresser.
On distingue huit modes. La musique classique n'en a que deux le majeur, le mineur. Chaque mode est une sorte d'ambiance caractérisé par des notes privilégiées : tonique et dominante. Il est difficile de décrire l'impression donnée par chacun. Par exemple on pourrait dire que le quatrième est celui de l'intériorité, le sixième fait souvent enfantin, mais les mots manquent, d'autant plus que la variété de chacun dissuade de vouloir les définir. Sans doute tel type de pièce est caractéristique d'un mode comme on pourrait dire tel visage est certainement slave, latin, germain, anglo-saxon. Pourtant tous les slaves ne se ressemblent pas, ni les latins il y a même des slaves qui se mettent à ressembler à des latins sous le soleil méditerranéen. En grégorien, cela tient pour une bonne part à la centonisation de la pièce. Les centons sont des formules mélodiques, qu'on retrouve facilement dans tel ou tel mode. Pour tout simplifier il faut savoir que beaucoup de pièces changent de modalité afin de mieux sonoriser le suspense du récit. Certains répons de la Semaine Sainte donnent l'impression par leurs changements de mode qu'on se trouve dans un mauvais lit où aucune position n'est bonne. Ce n'est pas très étonnant quand il s'agit de faire communier au lit de douleur que fut la passion du Christ.
Pour bien restituer le chant grégorien, l'idéal serait de connaître exactement comment on le chantait quand on avait le génie de ces mélodies.
Imaginons que le rock ait précédé le grégorien. Nos experts pourraient s'arracher leurs derniers cheveux, si tombant sur de vieux manuscrits ils ne jouissaient que de quelques signes, au dessus d'un texte, pour restituer ce chant. A coup sûr, cette restitution musicale serait assez éloignée de ce qui se pratiquait chez nos rockeurs médiévaux, surtout si se fiant aux seuls manuscrits, ils ne s'étaient même pas aperçu que c'était une musique de mode, pour salle de spectacle, appuyée par une acoustique artificielle de sono surpuissante et devant dégager d'immenses profits . L'envers du grégorien! Autant le rock est sensationnel autant le grégorien est ascensionnel! Quant à créer du néorock inutile de dire que n'ayant plus l'esprit rock il en résulterait des compositions très approximatives mais peut-être pas sans valeur, si elles émanaient de compositeurs vraiment artistes et peut-être même géniaux. Ce serait alors un nouveau genre encore inédit.
La situation n'est sans doute pas tout à fait symétrique pour le chant grégorien et son retour devenait pressant au XIX ème. Ce fut l'ambition de Dom Guéranger, restaurateur de l'ordre bénédictin en France d'essayer de mettre en oeuvre des travaux en vue de la meilleure restitution possible de ce chant. Sous son impulsion, plusieurs moines y travailleront, entre autres Dom Jausions, Dom Mercure et Dom Pothier, qui lanceront la paléographie musicale à partir de manuscrits photographiés dans toute l'Europe et enfin Dom Mocquereau et Dom Gajard qui publièrent de nombreux livres de chants liturgiques. Deux papes, Pie X et Pie XI promurent à nouveau le chant grégorien le premier par la Constitution apostolique motu proprio en 1903; le second par celle intitulée « divini cultus » en 1928. Le grégorien fut à nouveau imposé comme chant liturgique de l'Église. La Constitution sur la liturgie, de Vatican II, le recommande encore mais de manière non exclusive: «L'Église reconnaît dans le chant grégorien le chant propre de la liturgie romaine; c'est donc lui qui, dans les actions liturgiques, toutes choses égales d'ailleurs, doit occuper la première place».
Malgré une désaffection presque générale, Solesmes poursuivit ses efforts. Ce sont les travaux savants de Dom Eugène Cardine, avec sa « Sémiologie grégorienne » (Solesmes 1970) continué par Dom Jean Claire et Dom Saulnier.
Par la sémiologie Dom Cardine poussait plus en avant l'étude des signes sur les manuscrits. Ceci permis une connaissance plus approfondie de la façon d'interpréter les mélodies. Si tout le monde s'accorde pour reconnaître une avancée dans la connaissance des manuscrits, toutefois les indications pratiques préconisées pour cette nouvelle méthode ne firent pas l'unanimité. Beaucoup préfèrent s'en tenir à « la méthode de Solesmes », celle suivie du temps de Dom Gajard.
Dom Gajard qui a beaucoup travaillé à la paléographie était en même temps le maître de chur à Solesmes à la différence de Dom Cardine et Dom Saulnier actuellement. Il avait une approche de savant tempéré de ce pragmatisme qui savait comment se comporte un chur et ce qu'on peut lui demander. Ils sont nombreux ceux qui estiment que sous sa direction, le chur de Solesmes a atteint son meilleur niveau.
En pratique les churs monastiques manifestent un certain consensus même s'ils ne se réclament pas de la même méthode. Les différences deviennent plus sensibles pour l'exécution de chantres en schola ou en solo. Il n'en va pas de même pour les chorales de laïcs, qui offrent tout un éventail d'interprétations allant du cultuel paroissial à la haute voltige du spectacle.
Quelques différences :
La méthode de Solesmes (Dom Gajard) préconise une grande régularité de base avec des variations de tempo relatives. Les sommets sont arrondis. Ils tiennent de la balistique. Au départ une impulsion non frappée confère un élan qui va en s'épuisant au fur et à mesure de la montée, au sommet la perte de vitesse est totale puis c'est la retombée pour laquelle on ouvre un parachute permettant ainsi un atterrissage en beauté. La dynamique peut se libérer du mot latin dans les vocalises, la mélodie y reprend ses droits. La Chironomie du Maître de Chur est très définie et précise. L'impression générale est celle d'une intemporalité sacrée.
La nouvelle méthode ( Dom Cardine, Chanoine Janneteau, Dom Jean Claire, Dom Saulnier): L'optique ici est différente et on pourrait presque dire que c'est une absence de méthode dans la mesure ou plus de latitude est laissée pour l'interprétation. Risquons cependant quelques traits plus saillants. Les cordes modales (tonique dominante ) sont davantage mises en valeur et exercent une attraction d'autant plus forte qu'on s'en rapproche. C'est comme une aimantation vers des sommets moins évanescents . Sur le modèle du « Cantique des Cantiques », si l'amant vient à se cacher, c'est comme un lâchage subit, le climacus de secours est dévalé à toute vitesse. Le rythme du mot latin s'impose toujours. Le comptage n'est pas utilisé. La Chironomie du Maître de Chur est intuitive. L'impression générale est celle d'un mouvement plus alerte, une modalité plus marquée.
La première génération de manuscrits était avare en indications mélodiques. Des signes étaient dessinés au-dessus du texte. Le plus connu de ces manuscrits est celui de l'abbaye de Saint Gall en Suisse. Ces manuscrits à notation neumatique, s'ils n'indiquent pas la valeur des notes donnent cependant beaucoup de précisions de nuances. Cela suppose en arrière plan une bonne tradition orale de ces mélodies
« On attribue à Gui d'Arezzo, au cours des cinquante premières années du XIe siècle (il est mort en 1050), l'invention de la portée de plusieurs lignes, et des noms des notes de l'hexacorde de base Ut Ré Mi Fa Sol La ( cf hymne "ut queant laxis" ). Ces inventions fourniront enfin avec précision la ligne mélodique des chants.
Il est certain, comme l'ont fait remarquer les auteurs modernes, que la notation diastématique est pauvre en indications rythmiques, comparée à la notation neumatique (St Gall) ». ( Pierre Billaud).
« Au XIIe siècle, la plume d'oie se substitue au roseau et entraîne une déformation de l'écriture: les signes s'empâtent et la notation carrée, encore utilisée aujourd'hui pour le chant grégorien, remplace peu à peu les neumes ». (Mireille Helffer).
La plume carrée n'est pas taillée en pointe mais présente une arrête droite. Cette arrête est placée perpendiculaire aux lignes de portées. Cette particularité permet de faire des notes carrées éventuellement un peu convexe comme pour le punctum, ou des neumes plus longs, comme le porrectus, avec une épaisseur de trait variable, inférieur au début et supérieure à la fin suivant la courbure du tracé. Pour l'oriscus la plume décrit un petit « s » horizontal. Pour le strophicus par contre l'arrête est placée à 45°. Pour les petites liquescences, il n'est pas possible de le faire avec la même taille de plume etc. L'imprimerie respectera plus ou moins l'esthétique de cette écriture à la plume d'oie carrée. Le logiciel « GregEdit » pour sa part essaye de s'y tenir le plus possible et de fournir toute la panoplie des multiples combinaisons neumatiques.
Le chant grégorien connaît actuellement un certain regain d'intérêt. Beaucoup d'interprétations sont essayées engendrant une certaine concurrence stimulatrice. Pour l'usage cultuel cependant, le sens liturgique restreint le choix des solutions adaptées et heureuses.
GregEditor.
|